Dans cet essai, Yasha Mounk s’attache à définir ce qu’est la “synthèse identitaire”, idéologie qui a envahi le champs politique “progressif” (en particulier US, mais dont nous voyons des ramifications ici également) ainsi qu’une grande partie du monde universitaire.
L’intérêt principal de cet essai vient de ce qu’il n’entre pas dans des considérations de postures - pour défendre ou dénoncer le phénomène, mais tâche de le prendre au sérieux, à la fois dans sa généalogie intellectuelle, ses préoccupations (qui sont pour certaines tout à fait légitimes), ainsi que ses principales caractéristiques et impasses.
La synthèse identitaire est née de la fusion de différentes théories provenant de différentes traditions universitaires (post-modernistes, post colonialiste, théories critiques de la race et du genre, etc) et autant d’auteurs (en particulier : Foucault, Said, Spivak) dont l’emploi a explosé au cours de la dernière décennie au point de devenir dominant à gauche. Cette synthèse abouti à l’abandon d’une tradition (et d’une ambition) universaliste et à centrer le combat contre les différentes oppressions et injustices au travers des éléments identitaires des personnes concernées.
Si les finalités des différentes combats peuvent sembler parfaitement légitimes, il apparaît en revanche que l’approche “identitaire” porte en elle même ses propres impasses, à la fois théoriques, politiques et pratiques : le risque du tribalisme et de l’assignation identitaire guettent, et certaines politiques basées sur ces considérations identitaires ou raciales peuvent s’avérer totalement contre-productives - y compris même pour ceux qu’elle prétend protéger et défendre. Par ailleurs, ce type de discours tend à générer du clivage et du ressentiment.
Pour tâcher de passer outre ce qui semble être une impasse conceptuelle et politique, l’auteur suggère de revenir aux traditions libérales (au sens politique du terme), qui sont à même de fournir un cadre - neutre et universel - qui semble d’offrir des outils permettant de travailler sur les oppressions et injustices dénoncées.
Justice par Lucas Cranach l’Ancien (1537)