A travers 11 chapitres thématiques, Ian Kershaw établi un panorama des différentes interprétations historiographiques du nazisme, ses dynamiques propres, sa politique (économie, diplomatie et bien évidemment le génocide), ses spécificités (totalitarisme, fascisme), la façon dont il s’inscrit dans l’Allemagne de l’époque et d’aujourd’hui,
Une grande partie de l’ouvrage - remarquablement clair et documenté - permet de confronter deux “écoles” historique : l’une, qualifiée “d’intentionnaliste” (toutes les actions du régime son déterminées par la seule volonté de Hitler) et l’autre, de “structuraliste” (l’impulsion d’Hitler, qui agit essentiellement de façon opportuniste en fonction de déterminants extérieurs), Ian Kershaw s’attache à expliciter les visions sous-jacentes à chacune des écoles, et propose une interprétation qui permet de réconcilier les deux approches.
Notre examen des différentes interprétation de la part prise par Hitler dans l’élaboration de la politique intérieure, de la politique antijuive et de la politique étrangère du IIIe Reich est donc maintenant achevée. Dans chaque cas, avons-nous dit, aussi bien les “intentions” du Fürher que les conditions objectives ou “structures” sont indispensables pour comprendre l’évolution de la politique allemande entre 1933 et 1945. Aucune formule mathématique ne nous permet d’accorder a priori plus de poids aux une qu’aux autres. Nous avons vu que Hitler concevait les initiatives et prenait personnellement les principales décisions de politique étrangères, mais que cela était moins fréquemment le cas dans les affaires intérieures ou même dans la politique antijuive. S’agissant des affaires intérieures, il intervenait de façon intermittentes, en général à la demande d’organisme divers et souvent en désaccord entre eux, qui attendait de lui son feu vert pour des mesures législatives ou exécutives ; s’agissant de la “question juive”, sa principale contribution consista à fixer l’objectif ultime, à créer le climat approprié et à donner son aval aux initiatives de ses subalternes ; s’agissant de la politique étrangère, non seulement en tant que symbole il mobilisa les autres instances du régime autour de la “grande cause”, mais il joua lui-même un rôle capital dans la politique d’agression.
Autodafé, Opernplatz à Berlin, le 10 mai 1933