Dans le sillage du conflit du Haut Karabagh, l’auteur, historien spécialiste des crimes de masse et des génocides, revient sur l’histoire particulière du peuple Arménien au XXe siècle.
La thèse de l’auteur est que l’offensive turco azerbaïdjanaise s’inscrit dans le prolongement du génocide perpétré au début du 20e siècle.
En effet, l’objectif génocidaire ne se définit pas seulement par la volonté de destruction physique, mais également par la destruction de la mémoire du peuple persécuté. Il ne faut pas seulement que les personnes soient éliminées, mais il faut aussi que leur culture soit détruite, et la possibilité même pour eux, et pour les reste du monde du souvenir de leur existence. A l’anéantissement d’un peuple, doit succéder l’effacement de sa mémoire
Mais l’oubli est autre chose de plus grave encore, interdisant le deuil, détruisant la mémoire, condamnant tout espoir de connaissance alors qu’elle se révèle essentielle. Un événement hors d’atteinte des savoirs du monde vient de se produire avec la décision suivie de la réalisation de l’anéantissement physique et métaphysique d’un groupe humain.
C’est dans ce contexte qu’il retrace dans ce court essai, l’histoire du génocide Arménien, sa préparation, son exécution, sa difficile reconnaissance, y compris par les pays occidentaux. Ainsi, au delà de l’épisode paroxytique des massacres, le génocide doit également être considéré dans sa durée longue, de sa préparation jusqu’à se ramifications qui se poursuivent encore aujourd’hui. Ce connaissance du temps long du génocide passe en particulier notamment par le travail des historiens, la connaissance contre l’oubli, possible dans les pays ne pratiquement pas le négationnisme d’Etat.
L’idéologie de la négation du génocide appartient également à la longue durée du génocide ; elle débute dès le processus génocidaire, contribuant à aveugler totalement les témoins des persécutions et des massacres. Cette négation peut prendre aussi le caractère de la justification : la victime est responsable de son sort par la menace qu’elle exerce sur le régime totalitaire et sa société raciale. Même si les deux développements sont contradictoires, ils peuvent perdurer, le fait génocidaire échappant au cadre de la raison pour se projeter dans une eschatologie propre à son fonctionnement. L’activité présente d’Etats négationnistes et violemments anti-arméniens maintient la menace génocidaire. Elle trace un lien direct entre la guerre déclenchée au Caucase en 2021 et l’extermination des Arméniens au début du XXe siècle. La haine anti-arménienne, le négationnisme d’Etat sont capables d’abolir la distance temporelle et de maintenir des décennies durant un authentique programme de destruction humaine.